Sophie Carrier, lorsqu’elle peint, c’est d’abord la recherche d’un état; un sentiment de liberté et d’oubli de soi, qui la motive. C’est aussi le désir de créer un univers qui lui plaît visuellement : un monde foisonnant, gai et un brin naïf, loin d’un certain pessimisme morbide qu’elle perçoit autour d’elle dans la culture, les médias, l’art et qui peut l’affecter.

Cet univers se construit autour du thème du jardin. Le processus s’élabore directement sur la toile, la majeure partie du temps, le tableau posé à plat sur le sol. Elle procède en oscillation constante entre le hasard et les choix. Elle débute avec un élément clé qui l’aura précédemment allumée (un oiseau, une fleur), et le tableau se construit par couches d’accidents provoqués et d'éléments contrôlés, mêlant dessins, collage, éléments peints de façon réaliste, flaques de polymère, grands gestes avec de gros pinceaux, recouvrements, transparence, petits motifs, dans une composition où le vide côtoie le plein, où elle veut garder visible des traces de chacune de ces couches; comme un historique de la construction du tableau.

Laisser voir de la toile nue est une chose qui l’a frappée et séduite chez plusieurs artistes contemporains, dont François Lacasse, de qui elle a retenu aussi l’idée de verser la peinture sur la toile et de la contrôler sans pinceaux, en bougeant le tableau. L’univers des enfants est aussi omniprésent dans son travail. Étant enseignante au primaire, elle se sent très proche d’eux, très sensible à leurs dessins, leur imagerie. Son monde pictural se veut teinté de leur joie et leur naïveté, pour mieux faire oublier la dureté du monde où nous vivons.